Le timesharing, arnaque ou non?

Si vous comptez gagner certaines zones méditerranéennes, vous découvrirez que les guides vous disent de vous méfier du "timesharing". Sur place, on ne manquera pas de vous harceler pour vous vendre une de ces formules à "temps partagé". Le timesharing est-il une arnaque ou une nouvelle forme intéressante de vacances?


Le timesharing consiste à acheter le droit d’occuper, pendant une période assez longue (20 ans par exemple) un logement équipé et meublé comme résidence de vacances, pour 1 ou plusieurs semaines chaque année, souvent dans des complexes de type club.

Le système de vente est bien rodé. Lorsque vous débarquez sur une zone touristique des Canaries, de l’Algarve, des Baléares,…, vous vous faites aborder par de jeunes gens sympathiques qui vous proposent généralement de participer gratuitement à un concours. Vous tirez une carte et, inévitablement, vous gagnez un prix (une bouteille de champagne par exemple) que vous êtes censé aller chercher dans un hôtel-résidence des environs. Là, on vous fera l’article pour la vente d’un studio ou appartement en temps partagé. L’argument-massue : "Combien dépensez-vous pour vos vacances ?" (…) "Eh bien, pour le prix de quelques années de vacances, vous avez la possibilité de disposer ici d’un appartement à vie ! En plus, vous pourrez échanger votre temps de vacances et passer un séjour équivalent partout dans le monde".

Un vendeur de time-sharing est tout à fait capable de passer la journée avec des acheteurs potentiels. Y compris en l’invitant à déjeuner. Ce n’est pas pour rien qu’on parle de "vente agressive". Le vendeur veut faire comprendre à l’acheteur qu’il s’agit d’une chance exceptionnelle. Et même une chance d’un jour ! Pas question, paraît-il, de ramasser la proposition de vente et de s’en retourner l’examiner calmement…

Et un vendeur peut raconter n’importe quoi : il est payé à la commission et disparaîtra par la suite. Seuls les documents signés auront une quelconque valeur.

Bonne ou mauvaise formule ? 

Marianne a acheté une "période" dans une résidence de Madère il y a quelques années. Au final, elle n’est pas mécontente mais a quand même quelques remarques à formuler :

  • Le comparatif de vos vacances habituelles et des vacances en time-sharing effectué par le vendeur ne tient pas la route : c’est comparer des formules hôtelières (avec vol compris) avec un séjour en appartement avec, donc, des frais non compris;
  • Parmi ces frais, ceux d’entretien. Le vendeur prend soin de ne pas évoquer les frais liés à chaque séjour.
  • Le "propriétaire" d’une période de time-sharing peut effectivement participer à une bourse d’échange et troquer son temps contre un séjour dans une autre résidence, dans un autre pays. Mais il faut verser une cotisation annuelle pour bénéficier de cette bourse internationale d’échanges (chez RCI par exemple) et des frais sont liés à chaque échange. Par ailleurs, tous les séjours ne sont pas équivalents (ils pèsent un nombre de points différents - si vous êtes dans un système de points – selon l’état de la résidence, le nombre de pièces,…). Et il est des périodes de l'année où vous ne trouverez pas une seule résidence en France, en Espagne, au Portugal, en Allemagne,…
  • Contrairement à ce que prétendait le vendeur, on ne peut thésauriser ses périodes ou points pendant plusieurs années, histoire d’accumuler pour un long séjour exotique. Dans les faits, les séjours doivent être consommés dans une période limitée.
  • Il ne faut pas spéculer sur la revente d’un timesharing. Elle risque de se faire à perte.

Voilà bien des inconvénients mais Marianne admet que le système lui a permis de bénéficier de studios ou appartements (selon qu’elle partait en couple ou en famille) d’un niveau supérieur à celui des hôtels dont elle avait l’habitude. Même si elle est retournée dans "sa" résidence à Madère, elle a aussi séjourné selon cette formule dans les îles Canaries, en Grèce, en France (Haute-Savoie et Languedoc-Roussillon), en Algarve.

Et la loi ?

L’expérience de Marianne est plutôt positive. Heureusement, pour elle, car en cas de litige, comment aurait-elle pu aller en justice pour un "achat" dans une île portugaise par des Belges avec, de l’autre côté, une société de l’île de Man.

D’autres Belges ont par contre été victimes d’escroqueries sur notre propre territoire. Ils étaient invités en Belgique à de grandes séances de vente où tout était mis en place pour qu’ils ne sortent qu’un contrat signé. Et, parfois, la résidence n’existait que sur papier ou son environnement était moins idyllique que prévu !

La loi belge est venue mettre bon ordre. Le timesharing est régi par la loi du 11 avril 1999 (modifiée par la loi du 19 janvier 2001 et par la loi-programme du 24 décembre 2002. Cette loi porte sur l’acquisition d’un droit d’utilisation d’immeubles à temps partagé et accorde une protection juridique aux candidats-acheteurs. Des contrôles sont effectués par l’Inspection Economique.

La loi belge prévoit une information préalable à la conclusion du contrat, des règles précises quant au contenu et à la forme du contrat et, surtout, la possibilité de renoncer, sans frais et sans motif, au contrat par lettre recommandée, ainsi qu’au contrat de crédit éventuellement conclu avec le vendeur ou avec un tiers (sur base d’un accord conclu entre eux) dans un délai de réflexion d’au moins 15 jours ouvrables, l’interdiction de réclamer tout paiement d’avance (acompte) avant l’expiration du délai de réflexion.

Cette loi belge s’applique à :

  • tout acquéreur d’un droit sur un immeuble situé en Belgique;
  • tout acquéreur d’un droit sur un immeuble situé dans un autre Etat membre de l’Union européenne en l’absence de législation dans cet Etat; 
  • tout acquéreur d’un droit sur un immeuble qui n’est situé ni en Belgique ni dans un autre Etat membre de l’Union européenne, habitant en Belgique au moment de la conclusion du contrat : 
    • si le contrat a été conclu en Belgique;
    • si le contrat a été conclu en dehors de la Belgique suite au démarchage d’un vendeur en Belgique ou à une proposition de voyage ou de séjour faite par un vendeur pour pousser l’acheteur à signer un contrat.

Qu’en déduire ?

Si vous êtes Belge, vous ne serez pas nécessairement importuné à l’étranger. Car les jeunes vendeurs s’adressent à des touristes qui manient leur langue. En Algarve, par exemple, on cible les Britanniques et les Irlandais. Un truc : baladez-vous avec un journal belge ou français sous le bras et vous serez tranquille.

Mais si vous vous faites "accrocher" ou si vous êtes demandeur par rapport au timesharing, prenez votre temps et refusez de signer dans la journée. Prenez bien connaissance de la loi belge avant de partir en vacances et n’hésitez pas à brandir le texte de loi devant le vendeur et de demander des modifications au contrat s’il y a lieu. S’il refuse, sortez !

Vos témoignages ?

Vous avez acheté un séjour en timesharing. Que vous soyez content ou mécontent, faites-nous part de votre témoignage…

Pour en savoir plus

  • Loi du 11 avril 1999 relative aux contrats portant sur l’acquisition d’un droit d’utilisation d’immeubles à temps partagé 
  • Fédération européenne de timesharing
    (
    www.ote-info.com
    ) (voir l'
    application de la directive européenne par pays
    et, particulièrement, la
    règlementation espagnole
    ).

Associations de victimes

  • APAF-VTP, Association des Propriétaires Adhérents Francophones de Vacances en Temps Partagé (
    www.apaf-vtp.com
    )
  • ADCSTP, Association Défense Copropriétaires-Semaines-Temps Partagé (
    www.tempspartage.org
    )

Philippe Allard
  









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