Tourisme en Algérie: rêve ou risque?
Les déserts attirent chaque année de plus en plus de voyageurs avides de grands espaces vierges et de calme absolu. Le Sahara algérien propose quelques-uns des plus spectaculaires paysages désertiques du monde. Mais après les récents incidents politico-terroristes, et surtout l'enlèvement et la séquestration de touristes dans le sud du pays, est-il raisonnable ou même envisageable, de s'y rendre? En tout cas, les tour operators spécialisés ont tranché : ils présentent tous l'Algérie dans leurs nouveaux catalogues hiver 2003-2004!
Un peu de géographie
Insérée entre le Maroc à l'ouest, la Tunisie à l'est, la Mauritanie et le Mali au sud-ouest, la Libye le Niger au sud-est, l'Algérie est un immense territoire de 2.382.000 km², soit 4 fois la France! Au nord, elle possède une large côte de 1200 km ouverte sur la Méditerranée.
C'est dans ces zones septentrionales que se concentre l'essentiel des 31millions d'Algériens, autour de villes comme Alger, Constantine ou Oran. Mais, l'immense majorité de la surface du pays est dédié à dame nature, qui a sculpté au cours des temps, des paysages d'une beauté minérale à couper le souffle... là, l'homme n'est qu'un hôte dispersé. Des ethnies étonnantes, comme les Touaregs ou les Mozabites, en ont fait leur royaume.
Un peu de politique
Les chiffres bruts font froid dans le dos : ces 10 dernières années, plus de 200.000 morts, un taux de chômage frisant les 30%, plus de 7 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté (23% de la population avec moins d'un euro par jour!)… De plus, les jeunes représentent 80% des chômeurs…et on ne voit toujours pas le bout du tunnel…
Le système de type socialiste, mis en place jusque la fin des années 80, a montré alors ces limites. Mais l'Algérie n'est pas parvenue, après 1988, à se tourner avec succès vers l'économie de marché. A qui la faute? Aux militaires tous puissants? Aux politiques au pouvoir? Le récent passage de Jacques Chirac a été acclamé par des centaines de milliers d'Algériens, heureux de revoir les Français s'intéresser de nouveaux à eux…mais on chuchote que, dans la rue, on ne verra pas la différence…
L'Algérie fait peur…
C'est vrai que l'Algérie fait peur… et, pourtant, il faut savoir que, même pendant les pires périodes de terrorisme, les immenses territoires du sud, avaient été épargnés par ce fléau. Les habitants de ces régions recelant les plus beaux paysages d'Algérie, se lamentaient de ne plus voir de touristes alors que, disaient-ils, "chez nous, pas de problèmes!". Alors, en 2000, les tour operators sont revenus… et les touristes aussi! Les affaires reprennent à Tammarasset! Malheureusement, au début 2003, des touristes, principalement allemands, sont enlevés et séquestrés pendant des mois…
Pourtant, tous ces T.O. parlent d'une seule voix : on continue à programmer l'Algérie ! Par goût pour ces paysages fantastiques, par respect pour les Algériens qui vivent du tourisme... et parce qu'ils sont convaincus que cet enlèvement restera une exception. Ces organisateurs chevronnés ne badinent pas avec la sécurité de leurs voyageurs, même s'ils organisent des trips "aventureux". L'encadrement, essentiellement autochtone, est de qualité. Et c'est vrai que les touristes enlevés voyageaient seuls...
Que voir en Algérie ?
L'Algérie est certainement le pays qui abrite les paysages sahariens les plus impressionnants et diversifiés. Montagnes, Tassilis et sables s'assemblent en un décor surréaliste. Les Touaregs qui y vivent sont très attachés à leur culture ancestrale, et sont, dès lors, très enrichissants à fréquenter. C'est donc le pays idéal pour le "trek" en 4X4 ou avec dromadaires, mais toujours en privilégiant les marches dans les sites les plus intéressants, ce qui permet véritablement de s'imprégner du désert!
Les grands sites ont pour nom : Tassilis du Hoggar, Tefedest, Atakor, Tadrart ou Tassili N'Ajjer...
Les vols "directs"
Plusieurs compagnies aériennes de charters, mais aussi Air Algérie, relient en vol direct, Paris à Djanet ou Tamamrasset, les deux villes du sud permettant le départ immédiat en trek dans le désert.
Cela suppose, pour le touriste, d'éviter, même psychologiquement, la capitale Alger et tous ses tourments...
Mais en plus, l'immersion dans le désert, au sortir de l'avion, après moins de 4 heures de vol, est impressionnante!
Bien "vivre" le désert..
Oubliez l'accessoire, vivez l'essentiel ...dit une pub pour une agence de treks! Et il est vrai qu'une petite aventure sous ces latitudes, aide à relativiser et à se remettre en questions.
L'essentiel, c'est d'abord l'eau ! Bien que les équipes en embarquent pas mal au départ de Tam ou de Djanet, pas question de la galvauder. Elle sera traitée au "Micropur", avant d'être consommée. Une autre denrée rare dans le désert est le bois. Les guides utilisent uniquement le bois d'acacia, pour faire chauffer le thé, qui est ici élevé au rang de véritable rituel. On le boira en 3 services, de moins en moins fort, et de plus en plus sucré. Quel contraste face à nos gaspillages quotidiens! Toutes les agences sérieuses adhèrent à certaines chartes de "Désert Propre", permettant par un comportement responsable, de souiller le moins possible, cette nature vierge. On s'y déplace par petits groupes de plus ou moins 10 personnes.
La journée type dans les Tassilis du Hoggar
Réveil naturel grâce aux premiers rayons du soleil, vers 7h. Mais oui, on est bien en plein milieu du désert, on a dormi à la belle étoile, emmitouflé dans son sac de couchage, car il fait frais la nuit. On a bien quelques courbatures car les petits matelas reposant à même le sol ne sont guère épais mais on a vite oublié tout cela, tant la sensation de pureté nous envahit. Pas de bruits, si ce n'est le chuchotement de nos accompagnateurs algériens, déjà réunis autour du feu, nous préparant le petit-déjeuner. Rapide "toilette", on se salit très peu dans le désert...
Après ce repas fortifiant, on se munit d'un petit sac au dos pour les affaires de la journée, et en avant, marche! Ahmed, notre guide touareg, ne possède ni carte, ni boussole, il sent littéralement le désert... Nous déambulons, tantôt sur des crêtes de sable ocre, tantôt au milieu de gigantesques sculptures de grès...c'est magnifique!
Vers midi, miracle! Nous apercevons nos 4x4, qui se sont déplacés, et nous attendent, à l'ombre, pour le lunch. Mohamed, le cuisinier, nous concocte des salades rafraîchissantes en un tour de main. Après une sieste bien méritée, à l'ombre des pitons de grès, nous repartons, soit pour une nouvelle marche, soit nous empruntons nos gros 4X4 Toyota Landcruiser, totalement increvables! Ils nous emmèneront dans un autre lieu où cet équilibre entre sable et grès, nous laisse pantois. Nous choisirons méticuleusement notre endroit de bivouac, toujours avec une vue inouïe.
Mohamed nous préparera un dîner, à base de légumes, de viandes grillées, et de taguella, galette de semoule de blé, la pâte étant pétrie, puis cuite dans le sable, sous la cendre du feu de bois. Puis, nous nous endormirons à l'hôtel 1000 étoiles, en scrutant cette voûte étoilée, qui représente un des plus grandioses spectacles qu'il nous est possible de contempler sur terre…
Un désert, c'est loin d'être vide!
La nature est là, sous-jacente. Mais il faut être attentif pour la percevoir. De très nombreuses traces nous révèlent la proximité d'animaux étonnamment à l'aise dans ce milieu, apparemment hostile : scarabées et sauterelles mais aussi lapins, bouquetins, chacals ou fennecs (le fameux renard des déserts).
Lors de notre passage dans le Hoggar, en janvier, on nous a raconté qu'il avait plu abondamment pendant 3 jours en octobre 2002. Les précédentes pluies dans la région remontaient à... 3 ans! Mais les graines des plantes étaient patientes et se sont ruées sur les gouttes de liquides providentielles, permettant alors au désert de nous offrir quelques belles taches vertes de-ci, de-là. Les herbes, les acacias, certains figuiers, mais aussi les coloquintes dont raffolent les chèvres et les dromadaires, nous ont parus totalement incongrus au milieu de cet univers minéral...
On peut alors repérer des "gueltas", points d'eau entre les oueds (lits) desséchés qui attirent nombre de créatures… dont l'homme!
Les peintures rupestres
On trouve de très nombreuses oeuvres rupestres dans le Sud algérien. Les plus spectaculaires et peut-être les plus belles se trouvent dans le Tassili n'Ajjer, vers la Libye. Ces peintures néolithiques sont datées de 5.000 à 10.000 ans avant notre ère. Elles représentent le plus souvent des scènes de chasse ou de culture. A cette époque, le rhinocéros et la girafe gambadaient dans la région! La désertification est donc un phénomène très récent, à l'ère géologique.
La Méharée
Ce sont alors les dromadaires qui serviront de moyen de transport. Ceci a comme avantage, d'éviter ce symbole de la vie "occidentale" qu'est la voiture! La sensation d'un moment rare, voir hors du temps, est alors encore exaltée... Un petit temps d'apprentissage est nécessaire pour "dompter" sa monture mais cela va relativement vite... et puis, c'est à la fois instructif et amusant. Le massif de l'Atakor se prête particulièrement bien à ce type de déplacement.
Les voyagistes spécialisés
Pour ce type de "trip", mieux vaut s'adresser à des tours opérateurs ayant l'expérience et les contacts privilégiés avec les agences locales. Le matériel, l'organisation et les guides seront alors à la hauteur de l'événement.
Toutes les sociétés (françaises) citées ci-après proposent des treks de 8 à 23 jours, en 4x4 ou en méharée, surtout axés sur l'aspect "nature". Comptez à partir de 800 euros par personne pour 8 jours en 4x4 dans le Hoggar, jusque 3.000 euros pour une véritable grande traversée en méharée de 23 jours!
Les prix pour une même destination varient quelque peu d'une agence à l'autre en fonction de la prise ou non en considération des taxes d'aéroport, de la présence éventuelle d'un "accompagnateur" en plus des guides locaux, de la qualité générale de l'alimentation proposée lors du trek...
N'hésitez donc pas, allez en Algérie!
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Didier Ergot
© Photos Didier Ergot