Les prénoms en expansion

Vous devez choisir le prénom de votre futur enfant. Et vous voulez faire preuve d'originalité. Cela devient de plus en plus difficile car le nombre de prénoms distincts ne cesse d'augmenter dans notre pays. Selon une analyse effectuée par l'Institut national de Statistique (INS), au 1 janvier 2002, on comptait très exactement 111.956 prénoms féminins contre 93.592 prénoms masculins. En 40 ans, le nombre de prénoms distincts s'est accru de près de moitié tant chez les hommes que chez les femmes.


Précision : par prénoms différents, on entend des prénoms qui, dans le code écrit, diffèrent l'un de l'autre par une lettre (ou par un signe écrit) au moins, même si la prononciation en est identique.

Un même prénom est porté en moyenne par 54 personnes chez les hommes et par 47 personnes chez les femmes. Les raisons de cette diversité croissante sont probablement multiples : la composition multiethnique de plus en plus marquée de la population, les contacts de plus en plus fréquents avec l'étranger, l'individualisation, l'affaiblissement des traditions, une plus grande souplesse des services de l'état civil, et l'impact des nouvelles possibilités d'explorer l'éventail des prénoms. Le milieu social des parents semble également jouer un rôle dans le choix du prénom.

Proportionnellement, les prénoms distincts sont plus nombreux chez les jeunes que chez les personnes âgées. Si on compare les femmes nées dans les années 50 avec les filles des années 90, on observe une baisse de 20% du chiffre de la population, mais d'autre part une hausse de 46% du nombre de prénoms distincts. Si l'on effectue la même comparaison chez les hommes, on constate un recul de 18% du chiffre de la population, mais de l'autre côté une augmentation de 47% du nombre de prénoms distincts. 

Diversification

La diversification est plus forte à Bruxelles en raison de la présence forte d'une population d'origine étrangère. Chaque "entité ethnolinguistique" apporte son fonds propre de prénoms. Même les groupes de population d'importance numérique relativement faible ont, de ce point de vue, un effet non négligeable. Les contacts de plus en plus fréquents avec les pays étrangers, les influences culturelles, l'impact des médias et le niveau d'instruction croissant ont pour effet que notre société est de moins en moins "monolithique".

L'éventail de prénoms est de plus en plus large, de nouveaux outils ont fait leur apparition pour chercher un prénom (livres recensant les prénoms, articles de presse, sites web spécialisés). Le poids des grandes traditions diminue fortement. Jadis, les prénoms passaient généralement de grand-père à petit-fils et de grand-mère à petite-fille. Cela est beaucoup moins le cas de nos jours.

Sans doute existe-t-il aussi une propension plus forte d'affirmer sa propre individualité, afin de se démarquer du plus grand nombre. L'attribution d'un prénom est l'une des manières de souligner cette individualité. Davantage qu'autrefois, les prénoms ont une fonction expressive et distinctive (sans préjudice de leur valeur esthétique). À travers le choix qu'ils font d'un prénom pour leurs enfants, les parents révèlent, délibérément ou non, en même temps quelque chose sur eux-mêmes ou une part d'eux-mêmes. Ainsi, ce n'est certes pas un hasard si à partir des années 80 se fait jour un certain engouement pour des prénoms renvoyant à la vie spirituelle, tels que Harmonie, Eden, Peace, Trinité, Tao et Zen. Les prénoms semblent par ailleurs avoir une durée de vie assez limitée : dans la plupart des cas, la crête de la courbe de fréquence s'étale sur quelques dizaines d'années, après quoi la courbe replonge. Certains prénoms présentent en revanche une courbe de fréquence plus régulière : en réalité, ceux-ci sont d'une occurrence plus rare, et par là même peuvent avoir cours de manière continue sur une longue période. "Quand trop de gens sont porteurs du même prénom, leur pouvoir identifiant est trop faible", indique le docteur Gerrit Bloothooft de l'Instituut voor Vreemde Talen (UiL-OTS) d'Utrecht.

En outre, les communes ne rechignent plus beaucoup à accepter des prénoms. Ce qui était encore souvent le cas dans le passé : les prénoms devaient provenir de la Bible, de l'Antiquité classique ou du "calendrier usuel" (listes établies par l'état civil des prénoms autorisés avec leur graphie); heureusement, e 1987, la législation a été assouplie.

Maints prénoms bibliques disparaissent, faisant place à un contingent, plus nombreux, d'autres prénoms. Sans doute faut-il y voir en partie un effet de la déchristianisation croissante de notre société. La communauté musulmane non plus n'échappe à cette laïcisation. La tradition musulmane consistant à nommer le fils aîné Moham(m)ed persiste, mais dans une mesure moindre qu'auparavant.

Les parents n'ont pas la possibilité de choisir leur patronyme, mais ils ont en revanche le droit de choisir un prénom pour leur enfant, droit dont ils usent volontiers. L'individu actuel est émancipé, et les domaines où règne la liberté ne sont pas laissés inexploités. Les parents vont souvent très loin dans leur quête de prénoms originaux et spéciaux. Quelques exemples : Poppy, Sterremelijn, Tsippy, Twinky, Tricky, Zorro, Storm, Thorgal, Maybe...

Il y a davantage de prénoms de filles en circulation que de prénoms de garçons. Ce phénomène semble déjà ancien et, de plus, il est international. Selon le Dr. Gerrit Bloothooft, il existe plusieurs raisons qui expliquent pourquoi les prénoms féminins sont plus diversifiés. La principale serait que les prénoms féminins sont souvent des variantes diminutives de prénoms masculins, et qu'il y a beaucoup de variantes produites. De plus, les parents semblent avoir une attitude plus traditionnelle envers les prénoms des garçons.

En donnant des prénoms à leurs filles, les parents sont plus ouverts à l'expérimentation et à l'innovation, ce qui résulte en un plus grand nombre de variantes et de prénoms. Aux Pays-Bas, les motifs "prénom donné d'après celui d'un parent" et "est un prénom néerlandais" ont un score plus élevé pour les garçons que pour les filles. Dans notre pays, le motif "prénom donné d'après celui d'un parent" est moins important. En effet, les prénoms des grands-parents se retrouvent habituellement dans les deuxième et troisième prénoms que l'on donne à un enfant. Ces deuxième et troisième prénoms sont traditionnellement celui du parrain ou de la marraine du bébé ainsi que souvent celui du grand-père ou de la grand-mère.

Prénom et classe socio-économique

Intuitivement, nous supposons qu'il existe un rapport entre le milieu socio-économique et le choix du prénom. Certains prénoms ont des connotations "aristocratiques" ou "intellectuelles", d'autres sont plutôt "populaires". Il en existe également des "intermédiaires" que l'on ne peut mettre dans aucune catégorie bien définie. Ces prénoms sociologiquement neutres se retrouvent aussi bien dans les classes supérieures que dans les classes inférieures. Les prénoms peuvent également migrer d'une classe vers l'autre, mais toujours en descendant.

L'attribution des prénoms est partout sujette au renouvellement. Ce renouvellement serait moins fort dans les classes populaires, mais c'est là qu'apparaissent d'abord les prénoms "étranges". Le groupe socio-économique "inférieur" s'empare facilement des prénoms nouveaux, rares et exotiques, choisissant des prénoms longs et sonores. Les classes "supérieures" préfèrent renouveler les prénoms par l'emploi de variantes phonétiques ou écrites.

L'origine et la motivation du choix du prénom diffèrent selon ces trois classes. Le groupe intermédiaire semble être le plus influencé par les nouveaux prénoms dont les parents ont pris connaissance dans l'entourage immédiat. La classe inférieure est plus attirée par les prénoms de vedettes qui apparaissent sur les écrans de télévision, alors que la classe supérieure l'est par ceux issus de la littérature. Par ailleurs, dans la classe inférieure, le choix du prénom est surtout l'apanage de la mère. Plus l'on monte dans l'échelle sociale, plus ce choix résulte d'un consensus entre les deux parents.

Jiri Pragman (source INS)

Quelques liens pour en savoir plus

En français :

http://www.jumeauxinfos.com/prenoms/prenoms.html

Ce site s'adresse aux personnes qui s'intéressent particulièrement aux prénoms des jumeaux. Il donne des informations provenant de la première enquête sur les prénoms donnés aux enfants jumeaux, triplés et plus; et une cinquantaine de témoignages de parents.

En néerlandais

::
http://www.meertens.nl/voornamen

Ce site propose toutes sortes d'articles sur les prénoms. Les textes sont écrits par Doreen Gerritzen, chercheur en anthroponymie à l'Institut Meertens.

En allemand :

http://www.kindername.de

Les prénoms allemands de A à Z (avec leur signification et leur étymologie), les noms les plus fréquents en Allemagne, des liens intéressants ainsi qu'un forum.

En anglais :

http://www.babynames.com

Une banque de données comportant plus de 6.000 prénoms américains et leur signification et les noms les plus fréquents aux Etats-Unis en 2002, votre grossesse de semaine à semaine. Si vous n'êtes pas content de votre prénom actuel, choisissez-en un nouveau qui correspond plus à votre personnalité grâce au "Random Name Generator".

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