Les huissiers de justice suscitent la confusion

S’il ne faut pas jeter l’opprobre sur une profession comme celle des huissiers de justice, il faudrait cependant constater que de plus en plus d’huissiers de justice contournent la loi quand ils procèdent au recouvrement de dettes auprès des consommateurs.


Plusieurs professionnels de terrain, associations de consommateurs et parlementaires tirent la sonnette d’alarme. Ils revendiquent un contrôle strict des pratiques de recouvrement par les huissiers de justice. Fréquemment, si un consommateur conteste un décompte, il risque de recevoir dans sa boîte aux lettres un courrier menaçant d’un huissier de justice : le paiement immédiat de la dette est réclamé ou le consommateur s’expose à une citation avec "tout frais à votre charge".

Une confusion dans les rôles

En fait, les huissiers sont surtout connus pour leurs compétences classiques et légales en matière de saisies de biens. Ils interviennent alors dans le cadre d’une procédure judiciaire sur base d’un jugement, ou d’un titre exécutoire.

A côté de ces missions légales, on constate, ces dernières années, que de plus en plus d’huissiers procèdent également au recouvrement de sommes par voie amiable et ce, en dehors de toute procédure judiciaire ou de titre exécutoire. Ce faisant, ils entrent en compétition avec les bureaux de recouvrement mais sans s’en tenir aux règles légales qui s’y appliquent.

D’un manque de clarté sur les frais…

Lors du recouvrement amiable de dettes, les huissiers de justice comptabilisent à charge du consommateur des frais non négligeables : il s’agit soit de frais qui sont prévus par leurs tarifs (par exemple "lettre de sommation"), soit des frais qui ne le sont pas (par exemple "frais bureau", "frais d’administration",....). Or, il est interdit aux bureaux de recouvrement d’opérer de cette manière.

Par ailleurs, les lettres de mise en demeure énumèrent toutes sortes de postes dont le débiteur ne peut vérifier l’origine. De même, il ne peut contrôler comment sont calculés les montants réclamés. Le plus souvent, on se limite à l’énumération des différents postes sous des dénominations telles que "montant principal", "intérêts", "frais de rappel", "droits de recouvrement”, ...

Concernant les intérêts, comme les intérêts débiteurs par exemple, celui qui est appliqué n’est pas expliqué, ni même la période (nombre de jours) pour laquelle ceux-ci sont calculés.

Les lettres de mises en demeure mentionnent souvent qu’en cas de non-paiement, la procédure judiciaire (citation) sera entamée et que les frais de celle-ci seront entièrement à charge du destinataire. Cependant, il n’appartient qu’au juge de condamner la partie débitrice au paiement des frais !

... à de l’intimidation

Quand des huissiers de justice procèdent au recouvrement amiable de dettes, ils utilisent leur propre papier à lettre pour les mises en demeure. Sur l’entête de ces lettres, il est évidemment indiqué que l’expéditeur est un huissier de justice. 

Beaucoup de consommateurs sont intimidés par cette mention. Peu de personnes savent que les huissiers de justice ne peuvent pas recourir à des mesures d’exécution forcée (c’est-à-dire des saisies) dans la phase de règlement à l’amiable. Le plus souvent, les lettres de rappel ne mentionnent d’ailleurs pas qu’il s’agit d’un recouvrement amiable.

Quelques associations attentives

  • CRIOC (Centre de Recherche et d’information des Organisations de Consammateurs) : www.oivo-crioc.org
  • GREPA (Centre d’Appui aux services de Médiation de Dettes de la Région de Bruxelles-Capitale) : www.grepa.be
  • Dignitas : www.dignitas.be

Philippe Allard 

        







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