Construction: le comportement des Belges évolue

Le Belge rêve peut être encore d’une maison individuelle à la campagne mais depuis quelques années, dans la pratique, cet idéal est de moins en moins fréquent. Aujourd’hui, un plus grand nombre de permis est délivré en vue de rénovations plutôt que de nouvelles constructions, la part des appartements et des autres formes de construction groupée augmente sans cesse, les habitations sont plus compactes et consomment moins d’énergie. Bref, nous constatons des modifications marquantes de notre comportement en matière de construction.



Cette évolution est essentiellement due à 2 facteurs : la réduction de plus en plus nette de la taille des ménages et la pénurie constante de terrains à bâtir de prix abordable. Par conséquent, le nombre de transactions portant sur des terrains à bâtir a diminué au cours des dernières années, tandis que les ventes de logements n’ont cessé d’augmenter.

Rénovation

Les candidats propriétaires optent donc de plus en plus souvent pour une habitation existante, ce qui fait bien entendu grimper en flèche le prix des maisons. De plus, dans la plupart des cas, l’achat d’un logement existant entraîne à court terme des transformations, rénovations ou extensions. Le logement est adapté à la situation familiale et équipé de tout le confort moderne.

Comme de plus en plus d’entreprises (y compris des entreprises clé sur porte) se tournent vers le marché de la rénovation, la concurrence y est très importante et, de ce fait, les prix fortement comprimés. Intéressant pour les particuliers, un peu moins pour les entreprises de construction.

Lorsqu’une maison est vraiment "vétuste" (il y en a des milliers dans nos grandes villes), il est préférable de la démolir et de la remplacer par une nouvelle construction contemporaine. C’est ce qui arrive de plus en plus souvent. Sur ce point, les pouvoirs publics pourraient faire un effort considérable en abaissant aussi de 21% à 6% la TVA sur ces travaux.

Logement compact

Le prix des terrains ne cessant d’augmenter, de plus en plus de personnes optent soit pour un terrain plus petit, soit pour l’achat d’une habitation existante.

Les maisons à 3 façades ou mitoyennes sont de plus en plus nombreuses par rapport aux maisons individuelles à 4 façades. La superficie moyenne des parcelles de terrain à bâtir commence aussi à diminuer.

Le concept de la maison mitoyenne est de mieux en mieux adapté aux exigences actuelles en matière de qualité. Parallèlement à la qualité du logement, c’est-à-dire la superficie, l’équipement et la durabilité, un espace extérieur minimal est toujours prévu, dans la mesure du possible : un petit jardin, une cour ou une terrasse, un abri pour les vélos et un endroit pour la voiture.

Dans les zones urbaines, les maisons mitoyennes adoptent une forme plus compacte : les logements superposés. Il s’agit de 2 habitations situées l’une au-dessus de l’autre et possédant chacune une entrée individuelle. Une variante encouragée par de nombreuses villes est celle du "logement au-dessus d’un magasin".

La construction groupée a également le vent en poupe. L’initiative peut émaner de la commune, de sociétés de logement social, de promoteurs immobiliers ou de grandes entreprises de construction. C’est ainsi que des rues ou des clos résidentiels entiers sont construits en une seule fois, ce qui présente de nombreux avantages : l’espace non bâti, rare, est mieux exploité et le coût du terrain par habitation mais aussi le coût de la construction sont nettement inférieurs. Par ailleurs, ce mode de construction permet de réduire la perte de chaleur. Parfois, une installation commune de chauffage est même installée.

Un habitat compact réduit le coût d’infrastructure des routes, des égouts et des installations d’utilité publique ainsi que les frais d’exploitation des services publics tels que la distribution du courrier et l’enlèvement des déchets ménagers. Il renforce le cœur des villes et des villages, ce qui profite aux petits commerces.

Autre avantage : la proximité des magasins, des écoles et d’autres facilités rend inutiles la possession et l’utilisation d’une voiture tout en encourageant celles d’un vélo. Des études ont révélé que les habitants de clos résidentiels ou de maisons mitoyennes sont plus impliqués dans la vie de leur quartier (contrôle social) mais jouissent de l’intimité nécessaire qui fait souvent défaut dans les immeubles à appartements.

Durable, adaptable
et (beaucoup) moins énergivore

Les techniques permettant de préserver l’environnement et de consommer moins d’énergie gagnent du terrain dans la construction. Bien que construire de manière durable soit plus coûteux, le maître d’ouvrage contemporain souhaite manifestement investir dans ce domaine.

Les réductions d’impôt associées à la mise en œuvre de moyens permettant d’économiser de l’énergie dans l’habitat s’avèrent encourager les personnes qui construisent (rénovent) à faire installer du vitrage à haut rendement, une isolation de la toiture, des vannes thermostatiques, une nouvelle chaudière, etc.

Mais d’autres techniques écologiques (ne bénéficiant pas toujours d’un soutien financier) sont de plus en plus fréquemment appliquées : réutilisation de l’eau de pluie et aménagement d’une toiture verte, par exemple. Les matériaux de construction écologiques tels que la cellulose, les panneaux en fibre de bois, le lin, le chanvre et la peinture à l’argile commencent à être connus mais leur percée se fait encore attendre.

De plus en plus de logements sont construits selon le système de la carcasse, c’est-à-dire uniquement les murs porteurs. Les cloisons peuvent être enlevées ou déplacées ultérieurement sans difficulté.

Cette technique de construction répond à l’évolution des besoins du maître de l’ouvrage et de sa famille. D’abord un ménage de 2 personnes, puis de 3 ou 4, voire 5 (quand le grand-père ou la grand-mère vient habiter avec la famille), et, ensuite, lorsque les enfants quittent la maison, à nouveau de 2 ou d’1 personne.

Une maison adaptable peut bénéficier d’un aménagement nouveau et adapté, selon les besoins, pour un coût aussi réduit que possible et avec un minimum de travaux de démolition.

La construction traditionnelle, conservatrice, est dans notre sang et nous ne pouvons l’en extraire qu’avec difficulté. La plupart des maisons et des appartements sont encore construits de manière traditionnelle. Pourtant, depuis quelques années, nous voyons apparaître de plus en plus de méthodes de construction différentes telles que la préfabrication en béton, la construction à ossature de bois et la construction à armature métallique. La maçonnerie est souvent remplacée par l’encollage, surtout en association avec des briques, des blocs silico-calcaires et du béton cellulaire, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.

Les personnes qui projettent de construire mais qui ne connaissent pas bien le secteur de la construction ou qui n’ont pas le temps ni l’envie de se consacrer pleinement à leur construction souhaitent de plus en plus souvent une solution globale. Il y a peu de temps encore, la construction clé sur porte était synonyme de maisons standardisées. Mais la situation a bien changé. De plus en plus d’entreprises abandonnent les plans types et travaillent en fonction de projets individuels, selon les désirs du maître de l’ouvrage et les possibilités du terrain. La part de marché de ce type de construction est par conséquent en hausse.

Sur le plan technique, les nouveautés sont plus nombreuses que ce que l’on pourrait croire au premier abord. Le chauffage par le sol s’impose peu à peu, les revêtements de sols industriels tels que les tapis de pierre, le béton poli, le polyuréthane et les sols coulés en époxy sont à la mode, tout comme les pompes à chaleur, l’énergie solaire, la domotique, la sécurisation, la vidéophonie, la ventilation, les plaques de cuisson à induction, la climatisation, les matériaux composites,...

Construire ensemble

La vie familiale contemporaine est en pleine évolution : nous restons célibataires plus longtemps, nous divorçons plus vite et nous vivons plus vieux. Notre existence est devenue plus flexible, plus légère et plus mobile, ce qui n’est pas sans conséquences pour notre mode d’habitation. L’achat, la rénovation ou la construction en commun d’un grand immeuble ("project pooling") connaît un succès grandissant dans notre pays.

Les ménages traditionnels sont certes encore majoritaires, mais ils sont de plus en plus rejoints par des célibataires endurcis, des familles monoparentales, des ménages recomposés et des éternels étudiants. Quiconque quitte le nid familial ne construit pas immédiatement son logement, mais voyage, cherche l’aventure, expérimente. Des formes d’habitat alternatives telles que des anciens châteaux, des écoles abandonnées, des bâtiments industriels désaffectés, des béguinages,... sont également tentées. Pour un couple seul, ces types de logements sont inabordables. Mais si plusieurs d’entre eux se réunissent, les possibilités se multiplient.

En plus des logements familiaux, ces projets prévoient souvent quelques espaces communs tels qu’un jardin, un abri pour les vélos, un local réservé au tri sélectif des déchets, des caves, une aire de jeu pour les enfants,...

Depuis les années 70, une autre évolution importante suit son cours : de plus en plus de femmes travaillent, ce qui entraîne une nouvelle répartition des tâches et crée des tensions dans la famille. La vie familiale devient plus complexe et la limite entre famille et monde extérieur s’estompe. L’habitat en subit les conséquences.

Les limites fonctionnelles des pièces disparaissent peu à peu. Les enfants jouent dans le séjour mais aussi dans la cuisine, dans la salle à manger et, même, dans la chambre de leurs parents. Le week-end, les salles de séjour sont transformées en chambres à coucher. Certaines tâches ménagères sortent de leur isolement. Ainsi, aujourd’hui, le repassage se fait partout dans la maison. La cuisine est désormais un espace polyvalent où l’on parle et où l’on travaille, où l’on accomplit les tâches ménagères et où l’on regarde même la télévision. La salle de séjour et la cuisine sont les deux pôles de la vie familiale. La salle à manger, en revanche, est menacée d’extinction. Et, malgré la popularité grandissante du concept de "bien-être", la salle de bains ne possède pas encore la nouvelle aura du « zen » relaxant.

L’habitat "kangourou" est une idée intéressante : un jeune couple emménage chez l’un des parents et la maison d’origine est transformée en 2 espaces de vie indépendants. Aux Pays-Bas et en Scandinavie, la formule est déjà bien ancrée dans les mœurs, tout comme en Australie où elle a été baptisée "Grannyflat". La Belgique est encore un peu en retard dans ce domaine, en partie à cause de nos réglementations urbanistiques et fiscales peu flexibles. Mais le concept fait son chemin car même les autorités ont été conquises par l’idée.

En effet, le nombre de personnes âgées ne va cesser d’augmenter et beaucoup d’entre elles vivent dans des maisons trop grandes, inadaptées à nos normes contemporaines du confort. Les maisons kangourous résolvent deux problèmes d’un seul coup : celui des personnes âgées qui disposent de trop de place mais qui ne veulent pas déménager et celui des jeunes qui ne sont pas encore financièrement capables d’acquérir un nouveau logement.

Retour en ville

Depuis quelques années, les différents pouvoirs publics essaient de rendre la vie en ville plus attrayante et semblent peu à peu y parvenir. L’exode urbain s’est arrêté, grâce aux encouragements (financiers) en faveur de la rénovation des logements mais aussi à une amélioration souvent remarquable de l’environnement de vie, aux meilleurs services proposés aux personnes qui recherchent un logement, qui transforment, qui rénovent et qui emménagent en ville, aux campagnes de promotion de la vie en ville,...

De plus en plus d’appartements sont construits dans notre pays. À Bruxelles bien entendu, mais aussi en Flandre et en Wallonie. Les raisons en sont une fois de plus le prix élevé des terrains à bâtir et la réduction de la taille des ménages mais aussi le fait que les moins bons résultats des places boursières au cours des dernières années ont fait de l’immobilier un placement à nouveau intéressant. Par ailleurs, l’amnistie "fiscale" a également joué un rôle (limité).

Les appartements semblent surtout plaire aux plus de 50 ans, dont la maison à la campagne est devenue trop grande, et aux jeunes d’une vingtaine d’années qui préfèrent acheter que louer. En effet, grâce au taux d’intérêt peu élevé, acheter équivaut presque à louer. Les jeunes achètent d’abord un appartement et, plus tard, construisent (ou font construire) une maison unifamiliale.

La grande vogue est certes un peu passée, mais la réhabilitation des anciens bâtiments industriels en espace de vie, qui a parfois eu pour résultat de magnifiques lofts, reste populaire parmi les personnes de vingt à quarante ans.

En outre, le particulier qui souhaite "construire un loft" peut s’adresser à un nombre sans cesse croissant d’entreprises. L’entrepreneur se charge alors uniquement de la carcasse et le client de l’aménagement. Comme tout (terrains, maisons, nouvelles constructions) devient plus cher, le client a parfois du mal à équilibrer son budget. Une solution pour lui consiste à se mettre personnellement au travail. Dès lors, le secteur du bricolage (tout comme celui des urgences dans les hôpitaux) se porte bien.

Une nouvelle dimension

L’évolution du contexte socio-économique dans notre société a fait prendre une nouvelle dimension au concept d’"habitat". Comme le prix des terrains devient inabordable, le nombre des constructions diminue et celui des rénovations augmente. Les personnes qui décident quand même de construire optent pour des parcelles plus petites et un habitat plus compact, où l’espace disponible est mieux exploité et où de nouvelles techniques, souvent issues de l’industrie, sont mises en œuvre. Les formes alternatives de logement ont le vent en poupe mais, pour l’instant, sont encore trop peu encouragées par les pouvoirs publics. Les clos résidentiels axés autour d’une place centrale où d’un espace vert commun, entourés d’une clôture et protégés par une porte d’accès sécurisée, pourraient devenir l’habitat du futur dans notre pays.

    







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